Un vol dérouté qui atterrit à un aéroport distinct de l’aéroport initialement prévu mais qui dessert la même ville, agglomération ou région, ne constitue pas une annulation de vol et n’ouvre pas droit à une indemnisation forfaitaire, au titre d’une annulation de vol, sauf s’il atteint sa destination finale trois heures ou plus après l’heure d’arrivée initialement prévue par le transporteur aérien effectif. Le transporteur doit proposer la prise en charge du transfert entre les deux aéroports.
Un particulier effectue une réservation unique auprès d’Austrian Airlines pour un voyage constitué de deux vols prévu en mai 2018, le premier entre Klagenfurt (Autriche) et Vienne (Autriche), avec un départ prévu à 18 h 35 et une arrivée prévue à 19 h 20, et le second entre Vienne et Berlin (Allemagne), avec un départ prévu à 21 h 00 et une arrivée prévue à 22 h 20, à l’aéroport de Berlin Tegel.
Les conditions météorologiques survenues lors de l’avant-avant-dernière rotation de l’aéronef devant effectuer le vol entre Vienne et Berlin a généré un retard, qui s’est répercuté sur les vols ultérieurs effectués par cet aéronef. Le vol réservé par le particulier a ainsi décollé de l’aéroport de Vienne à 22 h 07 et, n’ayant pu atterrir à l’aéroport de Berlin Tegel en raison de l’interdiction des vols de nuit en vigueur, a été dérouté vers l’aéroport de Berlin Schönefeld, situé dans le Land de Brandebourg (Allemagne), à proximité du Land de Berlin (Allemagne), où il a atterri à 23 h 18.
Le passager réclame une indemnisation forfaitaire (250 €) au motif que son vol a été annulé et que la compagnie aérienne n’a pas respecté son obligation de l’acheminer jusqu’à la destination finale, telle qu’initialement prévu dans le contrat de transport. Aussi, le transporteur ne lui a pas proposé un transport complémentaire de l’aéroport de Berlin Schönefeld vers l’aéroport de Berlin Tegel.
C’est dans ces circonstances que la Cour de justice, saisie par des questions préjudicielles, est amenée notamment à interpréter l’article 8, paragraphe 3, du règlement (CE) n° 261/2004, et plus précisément à juger si le déroutement d’un vol vers un autre aéroport de destination d’une même ville, d’une même agglomération ou d’une même région, constitue une annulation de vol ou à tout le moins un retard, ouvrant droit à l’indemnisation forfaitaire de l’article 7. Aussi, se pose la question du calcul du retard et des circonstances pouvant être qualifiées d’extraordinaires, de nature à exonérer la compagnie aérienne de l’indemnisation forfaitaire.
Observations
▶ Le règlement (CE) n° 261 date de février 2004, de l’air s’est brassé depuis mais il ne cesse de donner lieu à des interrogations tant ses dispositions sont générales et imprécises dans le dessein de protéger au mieux le passager, victime d’un retard obligatoirement important - de plus de trois heures -, d’une annulation de vol ou encore d’un refus d’embarquement (ce dernier faisant moins l’objet de contentieux). Revers de la médaille : cette généralité et cette imprécision donnent lieu à une double interprétation, légitime du côté tant du passager que de la compagnie aérienne, saisissant l’énergie de l’un et de l’autre et des juridictions pour batailler sur la question de savoir si le premier peut obtenir 250, 400 ou 600 euros, en fonction de la distance du vol en cause.
▶ Cet arrêt, venant dans le prolongement de celui rendu par la Cour de cassation en février 2021 (Cass. 1re civ., 17 févr. 2021, n° 19-21.362, BTL 2021, n° 3823, p. 157) est riche d’enseignements en ce qu’il précise la notion d’annulation de vol (voir déjà CJUE, 5 oct. 2016, n° C‑32/16, Ute Wunderlich c/ Bulgarian Air Charter Limited rendu au sujet d’une escale imprévue et CJUE, 19 nov. 2009, n° C 402/07 et C 432/07, Sturgeon et a. c. Air France), les conditions ouvrant droit à l’indemnisation forfaitaire : un retard important ou une annulation et non l’obligation d’assistance de l’article 8 du règlement. Cela suppose que la prise en charge de l’article 9 n’ouvre pas non plus droit à cette indemnisation forfaitaire. Par ailleurs, le passager, qui choisit d’être acheminé à sa destination finale par ses propres moyens, est remboursé à la condition que les frais ainsi engagés soient nécessaires, appropriés et raisonnables. Le juge national appréciera. Enfin, le transporteur peut, à juste titre, se prévaloir d’un événement qui s’est produit au cours de rotations précédentes effectuées par le même aéronef, si tant est qu’il soit bien à l’origine du retard, ce qu’il devra démontrer.
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