Résumé
Il appartient à la compagnie aérienne de démontrer, pour refuser l’indemnisation forfaitaire, qu’il n’a pas transporté le réclamant, titulaire d’une réservation confirmée, sur le vol retardé litigieux.
Faits et procédure
Madame X... réclame à une compagnie aérienne l’indemnisation forfaitaire prévue par l’article 7 du règlement (CE) n° 261/2004 au motif qu’elle a été passager d’un vol Bordeaux/Lisbonne, lequel est arrivé tardivement à destination. Devant le tribunal d’instance saisi à cette fin, le réclamant produit, au soutien de sa demande, une réservation confirmée pour le vol litigieux et succombe. En effet, pour le juge, le passager ne démontre pas s’être présenté à l’enregistrement dudit vol, conformément à l’article 3, §2, a) du règlement susvisé.
La Cour de cassation sanctionne le jugement au motif qu’il appartient à la compagnie aérienne de démontrer qu’elle n’a pas transporté le passager à bord du vol retardé litigieux.
Observations
Le jugement attaqué, en déboutant le réclamant de sa demande pour ne pas avoir démontré s’être présenté à l’enregistrement du vol en cause, était conforme à la jurisprudence rendue, à juste titre eu égard à l’article 9 du code de procédure civile et à la lettre même de l’article 3, §2, a) du règlement (CE) n° 261/2004, par la Cour de cassation en 2018 et en octobre 2019 (Cass. 1re civ., 14 févr. 2018, n° 16-23.205 et Cass. 1re civ., 10 oct. 2019, n° 18-20.491, Lamyline) : il incombe à celui qui sollicite l’indemnisation forfaitaire de justifier sa qualité de passager (Actori incumbit probatio, il incombe au demandeur de prouver le fait qui soutient sa prétention) et, pour cela il doit, d’une part, détenir et produire une réservation confirmée et, d’autre part, prouver s’être présenté à l’enregistrement, précisément au comptoir d’enregistrement, du vol en cause. Comment ? En communiquant, en pratique, une carte d’embarquement. Cette solution ne pouvait pas perdurer car la Cour de Luxembourg a rendu, quelques jours après l’arrêt du 10 octobre 2019, une ordonnance dans laquelle elle met à la charge du transporteur, le même que celui en cause dans le présent arrêt…, le soin de prouver préalablement qu’il n’a pas transporté le réclamant. Ce n’est que dans cette circonstance que le passager doit produire notamment une carte d’embarquement (CJUE, ord., 24 oct. 2019, aff. C-756/18, LC, MD c/EasyJet Airline Co., Ltd). Les transporteurs aériens y verront une inversion de la charge de la preuve critiquable, confortant la tendance fort consumériste de la jurisprudence tant de la CJUE que des juridictions nationales qui cherche à optimaliser l’indemnisation « immédiate et standardisée » des passagers, à moins qu’une circonstance extraordinaire libère la compagnie aérienne (BTL 2019, n° 3746, p. 421 ; BTL 2020, n° 3790, p. 384, Lamyline).
Extraits Réponse de la Cour Vu l’article 3, paragraphe 2, sous a), du règlement (CE) n° 261/2004 :
4. Aux termes de ce texte, le règlement s’applique à condition que les passagers disposent d’une réservation confirmée pour le vol concerné et se présentent, sauf en cas d’annulation visée à l’article 5, à l’enregistrement.
5. Il a été jugé qu’il incombait au passager de faire la preuve que chacune de ces deux conditions cumulatives était remplie (1re Civ., 14 février 2018, pourvoi n° 16-23.205, Bull. 2018, I, n° 34 ; 1re Civ., 10 octobre 2019, pourvoi n° 18-20.491, publié).
6. Cependant, par ordonnance du 24 octobre 2019 (LC, MD c/ EasyJet Airline Co. Ldt, C-756/18), la Cour de justice de l’Union européenne a dit pour droit que le règlement n° 261/2004, et notamment son article 3, paragraphe 2, sous a), doit être interprété en ce sens que des passagers d’un vol retardé de trois heures ou plus à son arrivée et possédant une réservation confirmée pour ce vol ne peuvent pas se voir refuser l’indemnisation en vertu de ce règlement au seul motif que, à l’occasion de leur demande d’indemnisation, ils n’ont pas prouvé leur présence à l’enregistrement pour ledit vol, notamment au moyen de la carte d’embarquement, à moins qu’il soit démontré que ces passagers n’ont pas été transportés sur le vol retardé en cause, ce qu’il appartient à la juridiction nationale de vérifier.
7. Pour rejeter la demande de Mme X..., le jugement énonce que celle-ci, qui produit une réservation confirmée pour le vol en cause, ne rapporte pas la preuve de ce qu’elle s’était présentée à l’enregistrement.
8. En statuant ainsi, alors qu’il lui incombait de vérifier si le transporteur aérien démontrait que Mme X... n’avait pas été transportée sur le vol retardé en cause, le tribunal d’instance a violé le texte susvisé.
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