SUR LE PRÉJUDICE CAUSÉ À UNE ASSOCIATION AGRÉE DE PROTECTION DE L’ENVIRONNEMENT - L’INFRACTION PEUT ÊTRE PROUVÉE DEVANT LA JURIDICTION CIVILE
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Dans une affaire concernant la défense d’espèces protégées, la cour d’appel de Versailles a pu rappeler certains critères de recevabilité des actions portées par les associations agréées et s’est prononcée sur la détermination du préjudice.
L’association France Nature Environnement, dont l’objet social prévoyait la protection de la nature et de l’environnement et, spécifiquement, la conservation des espèces animales et végétales, a attaqué les sociétés de différents parcs éoliens en dommages-intérêts au titre de la perte de 81 spécimens de faucons crécerellettes par collision avec les pales des éoliennes. Le tribunal de grande instance de Nanterre avait déclaré l’action de l’association recevable mais n’avait fait droit à aucune de ses demandes de dommages-intérêts. L’association a interjeté appel.
Deux questions se posaient dans cette affaire : la première portait sur la recevabilité de l’action de l’association France Nature Environnement et la deuxième sur la reconnaissance du préjudice et sa réparation.
Quant à la recevabilité de l’action de l’association
Les sociétés du parc éolien et EDF Renouvelables, mandatée par les premières pour la gestion et l’administration de leurs dispositifs, ont contesté, en première instance comme en appel, la recevabilité de l’action de l’association France Nature Environnement. Elles avançaient qu’en application de l’article L. 142-2 du code de l’environnement, « une association agréée peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les faits portant un préjudice direct ou indirect aux intérêts collectifs qu’elle représente constituant une infraction aux dispositions législatives relatives à la protection de la nature et de l'environnement » et que l’absence de constatation préalable d’une infraction rendait l’action de l’association irrecevable. La cour d’appel de Versailles a ici suivi l’interprétation du TGI de Nanterre en considérant que, même si certaines autorités ont le pouvoir de constater les infractions aux dispositions législatives relatives à la protection de la nature et de l'environnement, l’action de l’association n’y est pas conditionnée. Elle rappelle notamment que la preuve de l’infraction peut être apportée par tout moyen.
Quant à la réparation du préjudice de l’association
Il convient ici de préciser que les éoliennes dont il s’agit sont implantées sur des sites classés par la directive 2009/147/CE du 30 novembre 2009 concernant la conservation des oiseaux sauvages (JOUE L 020, 26 janv. 2010) en zone de protection spéciale, ce classement ayant pour objet la protection de nombreuses espèces d'oiseaux parmi lesquels le faucon crécerellette.
Les parties s’opposaient ici sur le point de savoir si l’infraction à l’article L. 415-3 du code de l’environnement, à savoir le délit d'atteinte à la conservation d'espèces animales non domestiques protégées, était constitué lors de la disparition d’un spécimen ou seulement si un préjudice est porté à la conservation de l’espèce concernée. L’association faisait également valoir que la qualification de cette infraction ne pouvait être évitée que si une dérogation avait été obtenue préalablement.
La cour d’appel de Versailles a accueilli l’argumentation de l’association France Nature Environnement selon laquelle les sociétés des parcs éoliens avaient bien commis la faute d’imprudence prévue à l’article L. 415-3 du code de l’environnement en ayant persévéré dans l’exploitation des éoliennes alors même qu’elles avaient été informées de la disparition d’un certain nombre de faucons crécerellettes sans avoir obtenu de dérogation préalable, conformément aux prescriptions de l’article L. 411-2 du code de l’environnement. Elle confirme ici que le délit d'atteinte à la conservation d'espèces animales non domestiques protégées est constituée dès lors qu’un spécimen a été abattu, et qu’il n’est pas besoin de constater une atteinte à l’état de conservation de l’espèce. Cette faute suffit, selon la cour d’appel, à justifier le préjudice moral causé à l’association et une réparation de celui-ci.
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